«Nous voyageons, certains d’entre nous pour toujours, pour chercher d’autres endroits, d’autres vies, d’autres âmes.» – Anaïs Nin
Elle avait raison cette chère Anaïs. Chaque voyage, selon la destination et le contexte, semble révéler une nouvelle facette de notre personnalité. Un alter ego inédit. De mon côté, c’est la métamorphose de mon style qui est particulièrement notoire quand je suis loin de la maison.

Veston vintage Goodwill | Chandail Murri X Cyanure | Pantalon Aritzia | Sac à main Carolina Herrera | Chaussures L’Intervalle
La Joëlle bohémienne de Holbox n’a rien à voir avec la Joëlle minimaliste de Copenhague. Tout comme la Joëlle avec son je-ne-sais-quoi parisien n’a rien à voir avec la Joëlle relax de San Francisco. Et la nouvelle Joëlle qui a émergé de Las Vegas, il y a quelques semaines, n’avait certainement rien à voir avec aucune autre Joëlle.
Las Vegas est la ville du clinquant, de la luxure, de l’excès et, soyons honnêtes, du mauvais goût. C’est un des rares endroits où, sur le même tronçon de rue, tu peux voir une immense boutique Louis Vuitton coulée dans l’or, des acrobates tout de spandex vêtus et une fille jouer aux machines, cigarette à la bouche et gougounes aux pieds.
C’est Sin City où tout est permis. La ville où trop n’est jamais assez.
Vous l’aurez compris, Las Vegas n’est pas une capitale de la mode. Mais c’est quand même une capitale d’un des plus gros salons de la mode au monde, le MAGIC. Pour vous rafraîchir la mémoire, en février dernier, je me suis rendue là-bas avec MMODE (Grappe métropolitaine de la mode) à titre de créatrice de contenu officielle. Notre mission: promouvoir la mode montréalaise pendant ce rassemblement regroupant plus de 70 000 professionnels de l’industrie.

Blouse Eliza Faulkner | Pantalon Yoga Jeans | Sac Bouquet | Serre-tête Heirloom Hats
Il n’y avait pas juste moi et ma caméra au Nevada, mais aussi une foule de marques d’ici qui participaient à la mission #mtlstyle, dont Yoga Jeans, Markantoine, Solios et WellDunn. D’ailleurs, je vous parle de mes marques coups de coeur juste ici. Alors, comment décrire ce marathon de quatre jours? Je dirais rencontres, entrevues, conférences et beaucoup de café. Et selon le feedback des créateurs participants, beaucoup d’opportunités d’affaires.
Donc, de retour à ma métamorphose de style. Pour résumer, j’étais dans la ville où tout est permis, mais dans un contexte professionnel. Deux drôles de contraintes qui ont donné naissance à une nouvelle Joëlle. Un nouvel alter ego. Et voici ce qu’il m’a appris.

C’EST CORRECT DE NE PAS SAVOIR C’EST QUOI TON «STYLE»
Minimaliste. Maximaliste. Boho chic. Normcore. Street. Sport. Rétro. Preppy. Punk.
Moi, mon style? Difficile à dire. Ado, quand je faisais le quizz «Quel est ton style?» dans la revue Cool, j’étais systématiquement «toutes ces réponses». Longtemps, j’ai essayé de le définir, sans jamais parvenir à mettre le doigt dessus. «Je suis un peu ci, un peu ça, mais aussi un ça.» Comme si celle qui cherchait son style, se cherchait elle-même.
Si Las Vegas a confirmé une chose c’est que j’ai DES styles. Je peux autant porter un pantalon baggy et une chemise d’homme en faux cuir qu’une robe rose et des barrettes dans les cheveux et me sentir 100% fidèle à moi-même dans les deux. Un style éclectique, libre, est un style en soi.

Chemise et pantalon Aritzia | Camisole Frank & Oak | Pochette Miljours | Chaussures L’Intervalle

Robe Noémiah | Sac à main Carolina Herrera | Chaussures L’Intervalle
Je le vois un peu comme si mon corps était une feuille blanche sans texte. Je peux la noircir avec l’histoire de mon choix. Quel personnage ai-je envie de jouer? La journaliste sérieuse, la femme femme fatale ou Sporty Spice?
L’idée n’est pas de transformer sa garde-robe en costumier de Radio-Canada. C’est plus profond que ça. C’est de se permettre d’être qui on veut, quand on veut, sans avoir à mettre de mot dessus.

TU N’ES JAMAIS TOO MUCH
Le jeudi soir, un cocktail était prévu au chic restaurant Milos en compagnie de Export Québec. J’avais apporté une robe Eliza Faulkner pour l’occasion: bouffante, en taffetas, off-shoulder: LA TOTALE! Genre Cendrillon aurait pu la porter à son bal de finissants si sa belle-mère l’avait laissée à l’école.
Coup de théâtre: la journée de l’événement, l’hésitation s’installe. J’ai peur d’être d’être trop habillée, trop chic, too much. Selon les gens que j’avais côtoyés depuis le début de la semaine, l’ambiance s’annonçait plus salon de réseautage que mariage royal, disons.
Mais pourquoi étais-je soudainement intimidée de porter une robe que j’aimais tant? Avais-je peur de me faire juger? Que les gens me trouvent ridicule? Qu’ils m’observent pour les mauvaises raisons? Honnêtement, un peu de tout ça. Et malgré tout, je l’ai portée quand même.

Robe Eliza Faulkner | Sac à main Camille Albertine | Chaussures L’Intervalle
Premièrement, parce qu’elle prenait la moitié de ma valise et que je ne l’avais pas traînée de l’autre côté du continent pour rien. Deuxièmement, parce que c’était une création de Eliza Faulkner, une amie et designer hors pair, que j’étais fière de promouvoir. Troisièmement (et surtout), parce qu’elle me faisait sentir belle et forte. Elle prenait de la place. Elle attirait les regards. Elle m’obligeait à m’affirmer et à camper le rôle que j’étais venue remplir. Parce qu’avoir peur d’être too much, c’est d’avoir peur d’être trop grande quand on est habituée de se faire petite.
Post-mortem de la soirée: j’ai tellement reçu de compliments sur ma robe que j’ai arrêté de les compter. Mais l’important c’est que, même si personne n’avait rien dit, je l’aurais portée pareil.

JE NE M’HABILLE PLUS POUR SÉDUIRE
Il y a une différence entre s’habiller pour se trouver belle et s’habiller pour que, dans mon cas, les hommes me trouvent belle. Ce n’est pas depuis longtemps que le premier scénario me sied mieux. Est-ce une conséquence naturelle d’être casée depuis un bout de temps? Peut-être. Mais c’est à Las Vegas que je l’ai vraiment réalisé.
Pour ma mission avec MMODE, j’avais préparé une belle brochette d’ensembles funky que Leandra Medine aurait facilement pu qualifier de man repeller. Mon inclinaison vers l’extravagance était clairement le fruit du contexte de mon voyage. Un salon de la mode à Las Vegas: l’heure était à l’expérimentation.

Chandail Eliza Faulkner | Pantalon Frank & Oak | Ceinture Aritzia | Chaussures Vans
Consciemment ou non, j’ai complètement retiré la variable «séduction» de mon processus de sélection. J’avais envie d’ensembles qui n’étaient pas régis par ce qu’on révèle ou ce qu’on ne révèle pas assez, mais plutôt inspirés par un désir d’explorer. Comme une artiste qui ne recherche pas à faire un joli dessin, mais plutôt un dessin qui reflète un propos.
Je sais ce que vous avez envie de me dire: «Joëlle, relaxe. C’est bin juste un col roulé fluo avec un jean lousse!». Mais pour moi, c’est plus que ça. On aurait pu dire la même chose des toiles de Rothko—c’est juste des carrés de couleurs!—mais ce n’est pas parce que quelque chose à l’air simple que le cheminement l’est. Tout est une question d’intention.
P.S.: Si t’es un designer montréalais et que t’as envie d’en apprendre plus sur les différentes initiatives de MMODE (il y en a un paquet!), c’est juste ici. Et si, comme moi, t’aimes juste beaucoup la mode locale, je te conseille de consulter leur répertoire d’adresses locales.
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